vendredi 15 mars 2013

Contrepoint n°4

Dans chaque ville d'Argentine, ils attendent, sagement alignés le long des quais de la gare routière, peints, en couleurs rutilantes,  aux armes de la compagnie qui les emploient. Les autocars sont le moyen de transport à longue distance les plus utilisés en Argentine. Ils peuvent vous emmener à plus de mille kilomètres pour une somme qui parait dérisoire aux habitués du TGV français.
La nuit est tombée, on s'installe : couverture sur les jambes qui s'appuient sur des repose-pieds, coussin derrière la tête, siège inclinable à 150, voire 180 ° pour les plus luxueux. Une petite collation vous est servie, histoire de ne pas dormir le ventre vide. Le car démarre et se faufile, rideaux tirés, dans les rues désertes de la ville.
Pour vous aider à trouver le sommeil, la compagnie au nom évocateur (Mar y Valle, Patagonicus, Don Otto...) a prévu un film du genre Walt Disney, tendance Coccinelle, que l'on regarde vaguement d'un oeil pendant que les paupières s'alourdissent. Puis on s'endort, réveillé de temps à autre par la traversée d'une ville (les Argentins adorent les ralentisseurs que l'autocar doit franchir au pas, comme un éléphant qui s'agenouille puis se relève), ou une étape dans une gare routière.
Le matin arrive. Le soleil éclaire un paysage déjà différent de celui de la veille au soir. Si l'on a la chance d'occuper les places à l'avant du car, à l'étage - car les longs courriers ont presque toujours un étage - l'effet est magique : assis au dessus de la route, à hauteur des vols d'oiseau, la suspension absorbe les cahots de la route, le silence est complet, la vision panoramique. ce n'est plus un car, c'est un tapis volant qui vous transporte dans le paysage issu de vos rêves.
Tout a une fin. Le car arrive à la gare routière. Le préposé sort la valise. Il faut retrouver la réalité, découvrir une nouvelle ville, s'orienter, chercher l'office de tourisme, l'hôtel bon marché... Parfois on se dit que l'on resterait bien dans le car-tapis volant, pendant un voyage qui durerait toute la vie.  

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